CE, 10 juillet 2020, Société Comptoir Négoce Équipements, req. n° 430864, à publier au Recueil

Le Conseil d’État précise les conditions de résiliation et d’indemnisation dans de telles situations, sur la base des principes posés par sa jurisprudence Commune de Béziers (CE, Ass., 28 décembre 2009, Commune de Béziers, req. n° 304802 : Rec. CE, p.509), et notamment au regard l’exigence de loyauté et l’objectif de stabilité des relations contractuelles.

En l’espèce, quelques mois à peine après avoir attribué les 3 lots d’un marché public de fournitures à une même entreprise, un pouvoir adjudicateur, réalise que la procédure de passation avait été entachée d’irrégularité.

En effet, les spécifications techniques figurant au cahier des charges avaient été formulées de manière trop restrictive, visant les produits d’une marque spécifique sans être assorties de la mention « ou équivalent », contrevenant ainsi aux dispositions du IV de l’article 6 du code des marchés publics alors applicable, aujourd’hui l’article R. 2111-7 du code de la commande publique.

L’arrêt rappelle en premier lieu qu’en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant.

Il précise que dans le cas particulier d’un contrat entaché d’une irrégularité d’une gravité telle que, s’il était saisi, le juge du contrat pourrait en prononcer l’annulation ou la résiliation, la personne publique peut, sous réserve de l’exigence de loyauté des relations contractuelles, résilier unilatéralement le contrat sans qu’il soit besoin qu’elle saisisse au préalable le juge.

Après une telle résiliation unilatéralement décidée pour ce motif par la personne publique, le cocontractant peut prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, pour la période postérieure à la date d’effet de la résiliation, au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s’était engagé. Si l’irrégularité du contrat résulte d’une faute de l’administration, le cocontractant peut, en outre, sous réserve du partage de responsabilités découlant le cas échéant de ses propres fautes, prétendre à la réparation du dommage imputable à la faute de l’administration. Saisi d’une demande d’indemnité sur ce second fondement, il appartient au juge d’apprécier si le préjudice allégué présente un caractère certain et s’il existe un lien de causalité direct entre la faute de l’administration et le préjudice.

En l’espèce, le Conseil d’État censure partiellement l’arrêt de la cour administrative d’appel pour n’avoir pas recherché si l’acheteur, qui avait rédigé le cahier des charges irrégulier, pouvait bien se prévaloir de ce motif pour prononcer l’annulation.

Eric GINTRAND

Avocat associé

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