CE, 25 septembre 2019,
France Nature Environnement, req. n° 427145, à mentionner aux tables du Recueil

L’association France Nature Environnement demandait l’annulation du décret du 3 août 2018 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement et certaines dispositions du code de l’environnement qui prévoit notamment d’appliquer un régime d’enregistrement aux installations de combustion d’une puissance comprise entre 20 et 50 MW qui étaient auparavant soumises à un régime d’autorisation.

L’association soutenait en premier lieu que le décret méconnaissait les objectifs de la directive 2011/92/UE.

Selon elle, le décret ne satisfait pas aux objectifs de cette directive, d’une part, parce que cet examen est effectué par le préfet par ailleurs compétent pour statuer sur la demande d’autorisation, d’autre part, parce ce qu’il ne prend pas en compte l’ensemble des critères définis dans l’annexe III de la directive, visant à déterminer si le projet d’exploitation doit faire l’objet d’une évaluation de ses incidences sur l’environnement.

Selon le Conseil d’État, il résulte de la combinaison de l’article L. 512-7-2 et du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement que le préfet, par ailleurs compétent pour statuer sur la demande d’enregistrement effectuée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), est chargé d’effectuer l’examen au cas par cas propre à ce type de projets, destiné à déterminer s’ils doivent faire l’objet d’une évaluation de leurs incidences sur l’environnement.

Il considère que si les dispositions de l’article 6 de la directive ont pour finalité de garantir que l’avis sur l’évaluation environnementale des plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soit rendu, avant leur approbation ou leur autorisation afin de permettre la prise en compte de ces incidences, par une autorité compétente et objective en matière d’environnement, il résulte clairement de ces mêmes dispositions que cette autorité est distincte de celle mentionnée à l’article 4, chargée de procéder à la détermination de la nécessité d’une évaluation environnementale par un examen au cas par cas.

Il considère en outre, qu’aucune disposition de la directive ne fait obstacle à ce que l’autorité chargée de procéder à cet examen au cas par cas soit celle compétente pour statuer sur l’autorisation administrative requise pour le projet sous réserve qu’elle ne soit pas chargée de l’élaboration du projet ou qu’elle en assure la maîtrise d’ouvrage.

Ce moyen est donc rejeté.

L’association requérante soutenait également que le décret méconnaissait le principe de participation institué par l’article 7 de la Charte de l’environnement qui dispose :  » Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi (…) de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement « .

L’article L. 123-2 du code de l’environnement définit les conditions et les limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l’article 7 de la Charte de l’environnement, est applicable, notamment, aux projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagement exécutés par des personnes publiques ou privées devant comporter une évaluation environnementale en application de l’article L. 122-1 du même code.

Le Conseil d’État juge que le régime de l’enregistrement dispensant d’une évaluation environnementale les seuls projets insusceptibles d’avoir une incidence notable sur l’environnement, la circonstance que ces mêmes projets ne fassent pas l’objet d’une enquête publique ne méconnaît pas, en tout état de cause, l’article 7 de la Charte de l’environnement.

L’association requérante soutenait enfin que le décret méconnaissait le principe de non-régression énoncé par le II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement qui dispose que les autorités s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du  » principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment « .

Le Conseil d’État juge qu’alors même que certaines des activités susceptibles d’affecter l’environnement au régime de l’enregistrement étaient auparavant au nombre des activités devant faire l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique, le décret ne méconnaît pas, par lui-même, le principe de non-régression de la protection de l’environnement, dès lors que, dans les deux cas, les activités susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement doivent faire l’objet, en application de l’article L. 122-1 du code de l’environnement combinées avec celles de l’article L. 512-7-2 s’agissant de celles soumises au régime de l’enregistrement, d’une évaluation environnementale.

Il juge que le fait qu’en 2017, sur 533 demandes d’enregistrement, 4 demandes seulement ont été instruites selon le régime d’autorisation en application des dispositions de l’article L. 512-7-2, les éléments statistiques, qui portent sur une période antérieure à l’entrée en vigueur du décret attaqué, ne permettent pas, en tout état de cause, d’établir que le décret attaqué a méconnu le principe de non-régression.

Eric GINTRAND
Avocat associé

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