CAA Nancy,  26 février 2019, req. n° 18NC00064

Une société évincée de l’attribution d’un marché de travaux a contesté son éviction, estimant qu’elle n’était motivée que par sa mauvaise exécution d’un marché public antérieur et a demandé au tribunal administratif l’annulation du marché et l’indemnisation de son préjudice, ce qu’a refusé la juridiction.

Elle a fait appel du jugement.

S’agissant de l’annulation du contrat, la cour constate que le rejet de l’offre de la société demanderesse n’est justifié que par sa mauvaise exécution d’un marché public précédent et que la collectivité n’a pas tenu compte des justifications qui accompagnent l’offre et qui sont jugées positives, ce qui méconnaît les dispositions de l’article 52 du code des marchés publics qui interdit à l’acheteur de se fonder sur cette circonstance pour rejeter une offre, sans apprécier d’autres éléments.

Par conséquent, la cour conclut à une appréciation « irrégulière » de ladite offre, par le pouvoir adjudicateur.

Cependant,  en application de l’arrêt Département de Tarn-et-Garonne (CE ass., 4 avril 2014, req n° 358994), elle juge que le vice n’est pas d’une gravité suffisante de nature à justifier l’annulation du contrat.

Elle considère en l’espèce que le vice n’est ni « un vice de consentement » ni « d’une gravité telle que le juge aurait dû le relever d’office ».

S’agissant des conclusions indemnitaires, la Cour applique la jurisprudence du Conseil d’État relative aux conditions dans lesquelles un candidat évincé peut arguer d’un préjudice devant être indemnisé (CE 27 janvier 2006, Commune d’Amiens, req. n° 259374).

En premier lieu, le juge doit vérifier que le candidat n’est pas dépourvu de toute chance d’emporter le marché et qu’il a donc subi un préjudice.

Dans l’affirmative, il n’a droit à aucune indemnité.

Dans la négative, il a droit en principe au remboursement des frais qu’il a engagés pour présenter son offre .

Le juge doit rechercher ensuite si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d’emporter le contrat conclu avec un autre candidat. Dans un tel cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu’ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l’offre, lesquels n’ont donc pas à faire l’objet, sauf stipulation contraire du contrat, d’une indemnisation spécifique.

En l’espèce, la Cour juge que l’offre avait des chances sérieuses d’emporter le marché dans la mesure où elle présentait les mêmes garanties que l’offre retenue, avec un prix plus compétitif.

La Cour fait donc droit à la demande d’indemnisation du requérant.

Eric GINTRAND
Avocat associé

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