CE, 24 juillet 2019, Société Nass & Wind smart services, req. n° 416862, à mentionner aux tables du Recueil
La société requérante avait contesté l’arrêté d’autorisation d’exploitation d’un parc éolien délivré à une société retenue après un appel d’offre organisé par l’État, en invoquant par la voie de l’exception l’illégalité du choix de la société retenue.
Le Conseil d’État rappelle en premier lieu que la décision qui, au terme de la procédure d’appel d’offres, retient une candidature pour l’exploitation d’un parc éolien précède nécessairement la décision qui constitue l’autorisation administrative d’exploiter une installation de production d’électricité, délivrée au candidat retenu, laquelle désigne le titulaire de cette autorisation et fixe le mode de production, la capacité autorisée et le lieu d’implantation de l’installation.
Si la première de ces décisions rend possible l’édiction de la seconde, elle n’en constitue, pour autant, pas la base légale et la seconde décision n’est pas prise pour l’application de la première.
Les deux décisions ne forment donc pas une même opération complexe.
En conséquence, le Conseil d’État juge que la société évincée de l’appel d’offres ne peut utilement invoquer, à l’appui de ses conclusions dirigées contre l’autorisation d’exploiter, l’illégalité par voie d’exception de la décision ayant retenu la candidature d’une autre société au terme de l’appel d’offres.
Toujours selon l’arrêt, il ne peut davantage, eu égard à l’objet respectif des décisions en cause, utilement critiquer au soutien de sa demande d’annulation de l’arrêté d’autorisation litigieux la procédure d’appel d’offres ayant conduit à retenir cette candidature.
Rappelons que selon la théorie des opérations complexes, l’illégalité d’un acte administratif à caractère non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d’exception à l’appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si le premier acte a été pris pour permettre l’édiction d’un acte ultérieur et que si ce dernier a également été pris pour l’application du premier acte ou s’il en constitue la base légale.
Concernant la procédure d’appel d’offres, le Conseil d’État a considéré qu’elle était entachée d’un vice de procédure mais que cette irrégularité n’avait pas en soi d’incidence sur les caractéristiques du projet de parc éolien lui-même, et donc sur l’autorisation de l’exploiter.
Sur le terrain indemnitaire, le Conseil d’État juge que le rejet illégal de la candidature de la société requérante l’a privé d’une chance sérieuse de percevoir les compléments de prix prévus par le contrat de cession d’électricité, qui s’élevaient à la somme de 2 341 506 euros, ainsi que la rémunération minimale afférente à l’exécution du contrat de prestation de services, à hauteur de 400 000 euros.
En conséquence, il condamne l’État à verser à la société requérante une indemnité d’un montant de 2 500 000 euros.
Eric GINTRAND
Avocat associé