CE, 24 juillet 2019, Ministre de l’économie et des finances c/ M. C…, n° 430253, B, à mentionner aux Tables

Le Conseil d’Etat apporte une nouvelle précision sur les modalités de mise en œuvre de la protection fonctionnelle par l’administration à son agent victime de diffamations par voie de presse, en application de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983.

La protection fonctionnelle peut, le cas échéant parmi d’autres modalités, prendre la forme de l’exercice d’un droit de réponse adressé par l’administration au média en cause ou par l’agent diffamé lui-même dûment autorisé à cette fin par son administration.

En l’espèce, le responsable du pôle pilotage et ressources de la direction départementale des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques, avait estimé diffamatoires les allégations le concernant d’un député, reprises dans le journal « La République des Pyrénées ».

Il a ainsi demandé à sa hiérarchie, au titre de la protection fonctionnelle due aux fonctionnaires, de l’autoriser à adresser un droit de réponse à ce journal sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et de valider le projet de droit de réponse qu’il avait rédigé.

Sans réponse de sa hiérarchie, une décision implicite de rejet est née.

Il a sollicité la suspension de ce refus opposé à sa demande devant le juge des référés du Tribunal administratif de Pau, qui y a fait droit.

Les ministres de l’économie et des finances et de l’action et des comptes publics se sont pourvus en cassation contre cette ordonnance.

Si le Conseil d’Etat a annulé l’ordonnance du juge des référés palois et rejeté les demandes présentées devant celui-ci par l’agent pour défaut d’urgence, il a pris le soin de préciser les modalités de mise en œuvre de la protection fonctionnelle au bénéfice de l’agent victime de diffamations par voie de presse.

Le Conseil d’Etat a, dans un premier temps, rappelé la portée des dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 mettant à la charge de la collectivité publique et au profit des agents publics, lorsqu’ils ont été victimes d’attaques à raison de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général (voir en ce sens : CE, 22 juin 2011, Mlle Sophie A, n°344536).

Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire ou l’agent public est exposé, notamment en cas de diffamation, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu’il a subis.

La mise en œuvre de cette obligation peut notamment conduire l’administration à assister son agent dans l’exercice des poursuites judiciaires qu’il entreprendrait pour se défendre.

Il appartient dans chaque cas à l’autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l’ensemble des circonstances.

Dans un deuxième temps, le Conseil d’Etat a ajouté, et il s’agit là de la nouveauté, que la protection fonctionnelle due ainsi par l’administration à son agent victime de diffamations par voie de presse pouvait, le cas échéant parmi d’autres modalités, prendre la forme de l’exercice d’un droit de réponse adressé par l’administration au média en cause ou par l’agent diffamé lui-même dûment autorisé à cette fin par son administration.

Dans ce cas, il appartient à l’administration d’apprécier si, compte tenu du contexte, l’exercice d’un tel droit de réponse est la modalité appropriée pour assurer la protection qu’elle doit à son agent.

Statuant sur la demande de suspension en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’Etat a toutefois rejeté la requête pour défaut d’urgence.

Alexandre Riquier
Avocat

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