CE, 24 février 2020, Commune de Marmande, req. n°421291, sera mentionné aux Tables du Recueil Lebon
Un du agent cadre d’emplois des adjoints techniques territoriaux en qualité d’adjoint technique de deuxième classe stagiaire à temps complet de la commune de Marmande a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d’une demande tendant à l’annulation de l’arrêté le radiant des effectifs de la commune, à l’issue de son stage, à ce qu’il soit enjoint à la commune de Marmande de le réintégrer et de le titulariser et à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 5 000 € en réparation de son préjudice moral.
Le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes.
La cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé ce jugement et l’arrêté litigieux et a condamné la commune de Marmande à verser à M. B. la somme de 2 000 € en réparation du préjudice subi.
La commune de Marmande s’est pourvue en en cassation contre cet arrêt.
C’est l’occasion pour le Conseil d’État de préciser l’étendue du contrôle du juge saisi d’un litige portant sur la légalité de la décision de refus de titularisation en fin de stage.
Il rappelle avant tout qu’un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire.
La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne.
L’autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu’elle retient caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé. Cependant, la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l’intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.
Il en conclut que dans ce contexte, qu’il appartient au juge administratif de vérifier que la décision de refus de titularisation ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations.
En l’espèce, la décision de refus de titularisation était fondée sur des absences injustifiées et le fait que, comme le montraient des attestations concordantes des divers responsables de l’intéressé au cours de son stage, il n’accomplissait les tâches demandées que dans la mesure où elles l’intéressaient.
La cour administrative d’appel de Bordeaux avait donc, à tort, annulé la décision du maire, estimant que les faits ainsi reprochés à l’agent ne pouvaient caractériser une insuffisance professionnelle justifiant légalement un refus de titularisation au motif qu’ils étaient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires.
Le Conseil d’État étend ici la solution qu’il a très récemment retenue s’agissant du refus de renouvellement d’un contrat (CE, 19 décembre 2019, Commune du Vésinet, req. n°423685 : AJDA 2020 p.13).
Pauline BAGHDASARIAN
Avocat associé