CE, 24 juin 2019, EARL Valette, req. n° 407059, à mentionner au Recueil
En raison d’arrachages d’arbres contaminés par une maladie, illégalement ordonnés par des arrêtés préfectoraux alors que seul le ministre chargé de l’agriculture était compétent, la Société requérante demandait réparation des préjudices subis.
Selon l’arrêt, lorsqu’une personne sollicite le versement d’une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l’illégalité d’une décision administrative entachée d’incompétence, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l’ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement intervenir et aurait été prise, dans les circonstances de l’espèce, par l’autorité compétente.
Dans le cas où il juge qu’une même décision aurait été prise par l’autorité compétente, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme la conséquence directe du vice d’incompétence qui entachait la décision administrative illégale.
En l’espèce, le Conseil d’État souligne que s’il était préconisé par la plupart des études scientifiques disponibles à l’époque des arrêtés litigieux de procéder à l’arrachage des parcelles dont les arbres étaient affectés par la maladie lorsqu’était atteint un seuil de contamination de 10 %, il n’en allait pas de même pour un seuil de contamination de seulement 5 %, en l’absence de consensus en ce sens et compte tenu des marges d’incertitude dont témoignaient les études alors disponibles.
En conséquence, il considère qu’en jugeant qu’il n’existait pas de lien direct de causalité entre l’incompétence entachant les arrêtés préfectoraux et les préjudices subis par la requérante du fait des arrachages d’arbres ordonnés par les arrêtés préfectoraux retenant un seuil de contamination de 10 %, la cour administrative d’appel n’avait pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
En revanche, il juge la requérante fondée à soutenir que la cour a inexactement qualifié les faits de l’espèce s’agissant des arrêtés préfectoraux retenant un seuil de contamination de 5 %, dès lors qu’il ne résultait pas de l’instruction que le ministre aurait, aux dates considérées, pris des mesures identiques à celles résultant des décisions incompétemment prises par le préfet.
Eric GINTRAND
Avocat associé