CE, 11 décembre 2020, Société Air France, req. n° 427744, à paraître au Recueil
Selon l’arrêt, il appartient au juge administratif, saisi d’un recours de pleine juridiction contre la décision infligeant une amende sur le fondement des articles L. 625-1 et L. 625-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), de statuer sur le bien-fondé de la sanction attaquée et de réduire, le cas échéant, le montant de l’amende infligée en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’espèce.
Statuant sur le bien-fondé de la décision par laquelle des juges du fond se prononcent sur le recours de pleine juridiction dirigé contre une sanction professionnelle, le juge de cassation vérifie que le caractère fautif des faits et si la solution retenue par les juges du fond quant au choix de la sanction n’est pas hors de proportion avec les fautes commises.
En premier lieu, le caractère fautif de ces faits est susceptible de faire l’objet d’un contrôle de qualification juridique de la part du juge de cassation (CE, 27 février 2015, La Poste, req. n° 376598, 381828 : Rec. CE, p. 64).
En l’espèce, le caractère manifeste des irrégularités commises par la Compagnie Air France dont l’absence de détection constitue un manquement du transporteur à ses obligations de contrôle de nature à justifier le prononcé d’une amende, est susceptible de faire l’objet d’un contrôle de qualification juridique de la part du juge de cassation.
En second lieu, le juge de cassation exerce un contrôle sur la proportionnalité de la sanction par rapport aux fautes commises.
Rappelons que d’une manière générale, le nécessaire respect du principe de proportionnalité s’oppose à ce que l’autorité administrative ou juridictionnelle chargée de prononcer la peine soit privée de tout pouvoir d’appréciation dans le cadre d’un système de peines automatiques dans la mesure où le Conseil constitutionnel juge de manière constante qu’une telle automaticité pourrait conduire, dans certaines hypothèses, à infliger une sanction non proportionnée aux faits reprochés (Cons. const., 27 juill. 2000, décembre n° 2000-433 DC).
En conséquence, le juge administratif comme le juge judiciaire, procèdent à un plein contrôle de proportionnalité des sanctions prononcées par rapport au manquement comme l’illustrent de nombreux arrêts (CE, 20 mai 1996, Sté Vortex, req. n° 167694 : Rec. CE 1996, p. 189 ; AJDA 1996, p. 711 ; Dr. adm. 1996, comm. 477 ; RFDA 1996, p. 845 – CE, 13 novembre 1996, Assoc. « Changez la Une » : Rec. CE 1996, p. 450 ; RFDA 1997, p. 203 ; Dr. adm. 1996, comm. 562.).
Cependant, conformément à sa jurisprudence (CE, Assemblée, 30 décembre 2014, M. Bonnemaison, req. n° 381245 : Rec. CE, p. 443.- CE, Assemblée, 13 novembre 2013, M. Dahan, req. n° 347704 : Rec. CE, p. 279), l’appréciation du caractère proportionné de la sanction au regard de la gravité des manquements constatés et des circonstances de l’espèce relève de l’appréciation des juges du fond et elle n’est susceptible d’être remise en cause par le juge de cassation que dans le cas où la solution retenue est hors de proportion avec les fautes commises.
Eric GINTRAND
Avocat associé